Voyager pour réaliser
Je devais payer mon papier de toilette. J’étais tellement INSULTÉE. À un tel point que je voulais attendre jusqu’à l’hôtel avant de faire ce que j’avais à faire. Mais le vol avait été long, je n’avais pas le choix : payer 1 minuscule péso pour apaiser ma vessie.
Après un péniiiiiiiiiiiible 45 minutes d’autobus, nous voilà enfin à l’hôtel. À peine arrivée dans le hall, si je n’avais pas 12 Cubains qui se battaient pour monter mes valises (et avoir quelques pésos en plus), il n’y en avait pas un. De toute façon, je n’ai pas pris le temps d’apprécier cet accueil plus que chaleureux, la princesse était fatiguée et voulait rejoindre son lit. Après tout, je venais ici pour relaxer; je n’avais pas de temps à perdre avec tout ça.
Dès mon premier matin, la réalité m’a frappée. Je descendais les quelques étages pour me rendre au buffet à volonté. Je remarque à ce moment que j’ai oublié ma serviette de plage à ma chambre. Je remonte en vitesse pour ne pas faire attendre ma famille. Arrivée à ma chambre, les petites bouteilles de shampoing que j’avais laissées sur mon lit pour la femme de chambre n’y étaient plus. Elles avaient été remplacées par un message soigneusement écrit par la charmante Cubaine : Gracias Maria! Merci. Merci. You don’t know how! God bless you.
Princesse a chuté de son piédestal. Des produits d’hygiène de base la rendent aussi heureuse? Mais cou’donc, elle n’a rien ou quoi?
Effectivement, après avoir parlé avec elle presque tous les matins, j’ai réalisé qu’elle n’avait rien, cette pauvre dame. Elle voyait sa famille aux 3 ou 6 semaines, car elle devait rester sur le site de l’hôtel si elle voulait travailler. Évidemment, étant le pilier monétaire de la famille, elle n’avait probablement que cette option… Une option qui me semblait épouvantable à vivre, puisqu’elle venait d’avoir un petit bébé…
Après quelques jours, ma famille a commencé à me trouver bête, voire même méchante et arrogante. Je n’étais pas heureuse d’être là. Je venais de réaliser l’abondance dans laquelle je vivais. Je me sentais mal d’être dans un endroit paradisiaque et manger à ma faim, quand 30 minutes de coco taxi plus loin, certains n’avaient rien à manger. Ce n’est pas des farces ; je volais de la bouffe dans le buffet pour l’amener aux Cubains. Si j’avais le droit : aucunement. Est-ce que je m’en foutais : évidemment.
Voici les constatations que j’ai faites à ce moment : je suis en santé, je mange à ma faim, j’ai un toit sur la tête. Pourquoi je chiale, ma vie est parfaite ? Attention, je ne dis pas que des fois c’est rough, mais bien que je devrais apprécier davantage mon train-train quotidien.
On ne réalise souvent pas à quel point nous sommes gâtés et que nous avons beaucoup plus que ce que nous pensons. Ce voyage m’a ouvert les yeux sur l’essentiel : d’apprécier tout ce qui m’entoure, parce que certains se battraient pour avoir un centième de ma vie.
À partir de ce moment, j’ai appris à apprécier toutes les imperfections de ma vie, parce qu’après tout, c’est ce qui la rend si parfaite.