Un carré de sable « dans » mon appart
Octobre 2014 – La dépression.
Les arbres sont sans vie. Le gazon jaunit. La terre durcit. Le sol refroidit.
Je me replis dans mon chez-moi à regarder ma nature par la fenêtre, alors que mes pieds me demandent incessamment « de les laisser se reconnecter à la Terre ». Je leur répète « qu’ils ne toucheront qu’à du plancher de bois plat, dur et inerte », pendant les 6 mois froids qui suivront. Plus de gazon mouillé, de terre humide, de cailloux ronds, de sable chaud entre les orteils… Ça représente, pour mes p’tits pieds, 6 mois d’incarcération dans un soulier, une botte ou (avec un peu de chance) un gros bas de coton.
Octobre. Novembre. Décembre. Janvier. Février. Mars…
En fait, non. Pas cette année.
Novembre 2014 – La construction.
Mi-novembre, c’est décidé : si mes pieds ne peuvent plus se rendre au sable, c’est le sable qui se rendra à mes pieds! Je roule donc jusqu’au RONA pour me procurer cinq bouts de bois, des poches de sable et un p’tit paquet de vis. Arrivée à la maison, j’invite trois amis et c’est avec beaucoup trop de plaisir et pour seule aptitude en bricolage le scrapbooking que nous entamons la construction de mon carré de sable intérieur.
Décembre 2014 – La relaxation.
En tout sincérité, mon bac à sable, c’était avant tout un prétexte pour m’arrêter. Juste ne rien faire (et trouver ça ok). Ce petit compartiment d’un mètre cube, ça représentait le seul espace où je pouvais m’offrir, en toute paix, un temps de qualité avec moi-même. Quand mes pieds touchaient le sable, ma tête arrêtait de s’agiter. L’interrupteur « obligations » tombait momentanément à OFF.
C’est sur une p’tite butte de sable, dans mon appartement, que j’ai médité pendant qu’il neigeait en-dehors. J’ai ris, aussi. J’ai ris d’avoir vu ma chambre passer à deux grains de sable de se transformer en plage tellement je faisais de va-et-vient. J’ai ris d’avoir manqué de faire moisir mon plancher à force d’ajouter de l’eau au sable (trop obstinée à faire mes fameux châteaux de sable). En bref, endorphines garanties.
Au cours de l’année, comme l’espace commençait à se faire limité dans l’appart, j’ai glissé mon carré de sable sous mon bureau de travail pour étudier. C’était génial, ça aussi. Je pense que mes pieds ont apprécié, cet hiver-là, de relationner avec autre chose que du plancher.
Mai 2014 – La démolition.
Au printemps, je reviens à la maison, toute excitée, avec un ti-chaton dans une boîte de carton. Quelques jours plus tard, mes orteils se cognent à des « choses », sous ma couette de sable. Des p’tites « choses » odorantes. Une fois. Deux fois. Trois fois. Enfin, pas l’choix. Pas question que ma création prenne des allures de litière deluxe pour chaton! C’est avec le cœur gros que je rendis le sable… à ma belle nature.