Cher futur chum qui n’a pas connu ma mère
Sache que je vis avec une grande insécurité, celle de te rencontrer.
En fait, j’ai récemment pris conscience qu’une de mes plus grandes déceptions est de te rencontrer toi. Toi qui n’as pas connu ma maman.
C’est difficile d’accepter que chaque fois que je prononcerai son nom, que je dicterai ses meilleurs coups, que je te raconterai chaque souvenir; tu ne pourras pas te souvenir d’elle, tu ne pourras pas comprendre. En fait, tu ne pourras que te l’imaginer. Mais ton imagination ne pourra jamais te donner une représentation aussi merveilleuse de ce qu’est ma mère.
Et ça, ça fait mal à mon cœur. Ça me tue pour elle. Ça me procure une boule à l’estomac…
Chaque fois que je rirai, que je ferai une de ses mimiques, que je sourirai comme elle, que je serai extravertie pendant un souper où le vin coule à flot; toi tu n’en sauras rien. Tu ne pourras pas me rappeler à quel point je suis son reflet…
À travers notre histoire et notre future vie à deux, aide-moi à te faire découvrir celle qui m’a mise au monde, mais avant tout, tu dois apprendre qui je suis depuis la récente et surtout difficile perte de ce petit bout de femme, mais ô combien grande âme qu’est ma mère. Alors…
Laisse-moi pleurer, crier. Laisse-moi le droit d’être vulnérable parfois.
Si un jour tu t’aventures dans les petits mots d’amour; surtout n’ose jamais prononcer CHOUCHOUNE. C’est son petit mot doux, elle a les droits d’auteurs et les aura pour toujours.
Si j’ai une obsession avec la chanson Donnez-lui la passion de Lynda Lemay, ne te fâche pas de l’entendre 14 fois pendant le trajet Montréal-Drummondville. Remets-la une 15e fois.
Si je déteste chacune des fêtes importantes, ne m’en veut pas. Déteste-les avec moi, parce qu’elle n’est plus là. Aide-moi à casser chacune des décorations de Noël qu’elle avait choisi pour le prochain Noël, celui qu’elle n’a pas pu vivre.
Si je connais par cœur le numéro du St-Hubert, ne pose pas de questions. Maman et moi, on avait notre tradition.
Si je remplis de vêtements mon côté de la garde-robe et que j’empiète sur le tien, ne bronche pas. Je ne suis pas si pire, ma mère s’était accaparé quatre garde-robes dans la maison.
Si je suis toujours parti chez des amis, ne me demande pas de revenir; n’oublie jamais qu’ils sont ma famille et que ce sont eux qui sauvent ma vie depuis que ma mère est partie.
Si un jour je veux déménager dans une plus grande, une plus belle maison, ne t’emballe pas avec moi et rappelle-moi qu’ici c’est le paradis, que la beauté de cette maison réside dans ses souvenirs et dans l’amour qu’elle y a laissé.
Si un jour je te demande de partir en croisière dans les îles grecques, ne me dis pas qu’on ira dans deux ans. Ma mère a attendu toute sa vie pour finalement ne jamais faire suite à son rêve. On lui a pris sa vie et du même coup un de ses rêves.
Si un jour je refuse d’avoir des enfants parce que la douleur de savoir que ma mère ne les cajolera pas m’est trop forte, rappelle-moi que je retrouverai peut-être ses beaux grands yeux noisette dans les yeux de mon plus vieux.
De toute évidence, je sais que tu sauras être imparfaitement parfait pour moi. Parce que sur son lit, avant de rejoindre le paradis, maman m’avait dit qu’elle me réserverait de belles surprises et surtout, les yeux plein d’eau, qu’elle trouverait un homme à la hauteur de ce que je suis.
Peut-être que tu ne l’a pas connu, mais saches qu’elle; elle te connaît. Elle t’a choisi.
Cher futur chum qui n’a pas connu ma mère, saches que la plus belle des preuves d’amour est que tu te donnes corps et âme pour comprendre mon passé tout en me faisant avancer.
À très bientôt. xx
P.S: Maman, j’espère que tu te souviens de mes goûts. On est un team d’enfer!