Côtoyer les préjugés: quand enseigner devient éduquer
Dans la vie de tous les jours, je suis enseignante au secondaire. Les raccourcis intellectuels et la «belle naïveté», je la côtoie au quotidien. C’est ça qui arrive quand tu choisis de travailler dans le magnifique milieu des relations humaines. Mais ce n’est pas le sujet de cet article. En fait, je veux aborder avec vous le sujet de l’identité québécoise, canadienne, américaine, humaine.
Plus que jamais, au Québec, on se cherche une identité sociale. Les dernières années nous ont démontré que nous vivions dans la contradiction. Comment être deux personnes à la fois? Sommes-nous davantage identitaires, et ce, au détriment de tout accommodement raisonnable? Devons-nous être humains ou Québécois? Mon cœur balance entre les deux. Je crois que le vôtre aussi.
Malgré tout, malgré cette recherche constante de soi, malgré cette dualité qui existe en nous, il est important de faire attention à ce qui sort de notre bouche. Être ouvert d’esprit ne veut pas dire «faire le tapis», mais être identitaire ne veut pas non plus dire être grossier. Il faut réfléchir.
Je m’explique. L’autre jour, gros débat en classe. Vous devinerez que cela a eu lieu dû aux récents événements. Cette journée-là, j’ai décidé d’éduquer au lieu d’enseigner. J’ai d’abord demandé aux élèves ce qu’ils pensaient du 29 janvier, cette journée qui a fait couler beaucoup d’encre. J’ai été surprise.
«Qu’ils retournent dans leur pays.»
«À ce qu’il parait, en France, ils ont applaudi.»
«Il y avait deux coupables, un Québécois et un Arabe.»
Woh! Je les entendais et mes oreilles cillaient. Mais en même temps, je comprends. Ils ont 16 ans. La plupart d’entre eux n’ont jamais lu un journal de leur vie. J’en ai même entendu un l’autre jour avouer qu’il n’avait pas même lu un livre d’école. Ouch! Pour mon cœur de prof, ça fait mal.
Je reprends leur commentaire un à un. Qu’ils retournent dans leur pays, je l’ai entendu souvent celle-là et c’est vachement triste. Leur pays, c’est ici. Ils sont aussi Québécois que tu peux l’être. Peut-être n’ont-ils pas le même mode de vie que toi, mais ils sont Québécois, eux aussi. Qui plus est, les Québécois sont des immigrants par définition. Regardez l’histoire!
En France, ils ont applaudi? Je ne crois pas non. Leur cœur a saigné comme celui de plusieurs autres nations. Certains CRÉTINS ont applaudi. Des crétins, il y en a partout sur la planète.
Deux coupables. Mais qu’est-ce qu’un coupable? Selon ma définition et peut-être même celle du dictionnaire, c’est une personne qui a été jugée par un juge qui a rendu un verdict de culpabilité sur l’accusation du crime. Il y a un monde de différence entre un coupable et un accusé. Il est encore plus grand entre un coupable et un suspect.
Les stéréotypes, les généralisations et les fausses croyances parsèment notre environnement et notre humanité. Abolissons les préjugés ensemble!