Moi aussi j’haïs ça, vieillir

J’haïs mes fêtes. J’haïs ça, vieillir.

Je sais, «c’est juste un chiffre». C’est ce qu’on me répète, année après année, quand approche ma date d’anniversaire.

Je sais aussi que la plupart des gens essaieront de me convaincre qu’il faut voir ça d’un point de vue positif. Et juste comme ça, le fameux «30 is the new 20»… pu capable, merci. J’ai beau me dire que vieillir est un privilège qu’un tas de gens n’ont pas, je n’arrive pas à me convaincre. Pour moi, vieillir, c’est s’en aller directement dans un mur. Et chaque jour me rapproche de ce maudit mur.

Mais j’ai l’impression que c’est tabou de dire ça. Parce que c’est vraiment rare que quelqu’un me fasse un «high five» en criant «Moi aussi, ça me fait capoter!» Pourtant, je suis certaine que je ne suis pas seule.

14793827_10154262602813743_894671144_nWeheartit.com

La première ride, le premier cheveu blanc, les changements de dizaine… Je ne veux même pas y penser. Une amie qui tient un blogue a fait l’éloge de son premier cheveu blanc. Elle en était fière. Je l’admire, c’est bien de voir la vie en rose, mais moi, je ne suis même pas certaine d’en avoir déjà eu un. En fait, il y en a un, il y a quelques semaines, qui semblait beaucoup trop blond. Je n’ai même pas pris le temps d’en analyser la couleur et la texture, la pince à épiler était déjà en action.

Mes premières rides? J’ai presque déjà un budget Botox et je ne me gênerai même pas pour l’utiliser. Est-ce que c’est du déni? Certainement. Je riais de ma meilleure amie qui fête ses 28 ans chaque année – depuis plusieurs années, mettons – mais j’ai presque envie de faire la même chose.

Sauf que dernièrement, je crois que j’ai mis le doigt sur le bobo. Oui, les chiffres qui défilent font peur. Je vais vous épargner la soirée de mes 30 ans où j’ai pleuré toutes les larmes de mon corps à partir de 23h58 la veille de ma fête, dans un bar à Londres. Mais c’est surtout la comparaison de ma vie avec celles de mes ami(e)s du primaire et du secondaire qui me torture. C’est bien simple, ils ont tous une trâlée d’enfants, un chien, deux chats et une maison en banlieue. Moi? Oh que je ne suis pas rendue là. Je n’ai même pas envie d’être rendue là, mais ça me complexe de voir qu’ils sont tous devenus des adultes, avec des «vraies» vies d’adultes comme je les imaginais, plus jeune. Qu’ils ont accompli les buts que moi, je m’étais fixés pour ma trentaine.

Les partys de famille, aussi, deviennent de plus en plus pénibles avec le temps. Les cousins et cousines se sont tous reproduits à la pelletée et je suis ben contente pour eux. Mais d’arriver célibataire à chaque Noël pour se faire poser la même maudite question du «toujours pas de p’tit chum?» pendant que la progéniture des autres me court entre les jambes, bah je tripe pas trop. 

Dans ma tête, j’ai encore 19 ans. Mais c’est pas ça qu’on lit sur mon permis de conduire. C’est pas ça non plus que je laisse paraître dans ma vie professionnelle. Mais ce décalage-là, il pèse. Et il s’alourdit chaque foutu jour d’anniversaire.

Alors, quelqu’un peut me faire un «high five»?

Par Joanie Godin

Collaboratrice spontanée