La relève rock : la promotion virtuelle et ses écueils

Bandcamp, Soundcloud, Spotify, Deezer, Facebook, Twitter, Instagram: les outils de promotion en ligne ne manquent pas pour les jeunes groupes québécois qui tâchent de se faire connaître. Malgré cela, le défi persiste. Et le rock ne fait pas exception à la règle. Survol d’une situation bien plus complexe qu’il n’y paraît.

Crédit photo : Thomas Dufresne

Crédit photo : Thomas Dufresne

Stationnement d’un centre d’achats à Rouyn-Noranda, le 2 septembre 2014. Devant une poignée d’enthousiastes, les Deuxluxes interprètent avec fougue l’une de leurs compositions originales, I’m in love, dans le cadre du Festival de musique émergente d’Abitibi-Témiscamingue (FME).

Grâce à la plateforme Web bien de chez nous La Fabrique culturelle, cette performance peut être vue et revue à volonté ici (et l’a déjà été plus de 1700 fois). De tels tremplins virtuels sont devenus indispensables pour les groupes qui débutent dans l’industrie musicale. Cependant, s’ils accroissent les possibilités d’atteindre de potentiels auditeurs, ils compliquent également le fait de se démarquer parmi une pluralité de propositions.

                                                   Rivalité et «cri primal»

Crédit photo : Édouard Plante-Fréchette, La Presse

Crédit photo : Édouard Plante-Fréchette, La Presse

Pour Patrice Caron, curateur du Musée du Rock’n’Roll (dont je vous ai jasé ici) et créateur du GAMIQ (Gala Alternatif de la Musique Indépendante du Québec), l’offre sur Internet est très, sinon presque trop importante. Selon lui, les outils de diffusion sur le web créent une illusion de facilité et limitent les jeunes groupes plus qu’on ne le pense.

«On avait l’impression que oui, effectivement, ton cri primal est plus facile à sortir, explique-t-il. J’existe! Tes amis likent. Mais là, après, que ce ne soit plus juste tes amis, que ça aille plus loin, ce n’est pas par le Net. […] Par toi-même, c’est le cri primal et après ça, s’il n’y a plus personne pour prendre le relais, tu vas te perdre, parce qu’il y a 42 personnes qui lancent le même cri primal en même temps que toi.»

Source d'image : Page Facebook des Deuxluxes

Source d’image : Page Facebook des Deuxluxes

Étienne Barry, chanteur et guitariste pour le groupe de rock’n’roll mentionné plus haut, Les Deuxluxes, confirme la nécessité d’utiliser les plates-formes virtuelles, mais soutient qu’elles ne font effectivement tout de même pas tout le travail.

«C’est rarement assez de juste uploader quelque chose sur ton Soundcloud, puis attendre qu’il se passe de quoi. Tu n’as pas le choix de faire des shows, de promouvoir, de t’ouvrir une page Facebook et d’inviter tes amis, en espérant qu’ils vont le partager. Il faut que tu interagisses avec les gens», explique-t-il. 

L’expérience live, la nature même du rock’n’roll

Crédit photo : Chantal Lévesque

Crédit photo : Chantal Lévesque

Les nouveaux médias (même les plus «consacrés») ouvrent une multitude de fenêtres sur une pléiade de groupes de la relève. Mais ils relèvent du virtuel, de l’abstrait. Il n’en demeure pas moins que la meilleure façon pour une formation rock de faire ses preuves, c’est encore lors d’une prestation live.

«[En spectacle], il y a une énergie difficilement reproductible dans n’importe quel autre format musical, explique Patrice Caron. Je trouve que ce qui fait toute la valeur de la musique, c’est les émotions, ce qui est communiqué.»

C’est donc dire que le bouche-à-oreille est à ne pas négliger en tant « qu’outil de promotion ».

Le public visé par le groupe se reconnaît nécessairement, puisqu’il aura entendu parler de ce groupe par des amis ou d’autres amateurs touchés à leur tour par leur expérience live.

Source d'image : Page Facebook du groupe Admirals

Source d’image : Page Facebook du groupe Admirals

La scène rock québécoise est particulièrement effervescente depuis quelques années. Cela est certainement facilité par les médias sociaux et les plates-formes de diffusion en ligne. Reste que le nombre de salles hors âges où les jeunes groupes peuvent se produire auprès de spectateurs de toutes les générations est limité.

«On perd la génération des 15-18 ans, des gens passionnés de musique qui deviendraient peut-être des grands consommateurs de musique», déclare François-Xavier Paquin, batteur et chanteur pour le groupe Montréal Carnivores.

C’est en ouvrant de nouveau des salles de ce genre qu’on permettra de renforcer le lien qui relie les bands de la relève à leur public, toujours plus assoiffé de nouveauté et d’émotions.

P.S: Merci à Patrice Caron, Étienne Barry, François-Xavier Paquin, mais aussi à tous ceux qui ont gentiment accepté de répondre à mes 1000 questions qui ne figurent pas dans l’article : Claude Rajotte, Mathieu April, Julien Poirier, Félix Brassard, respectivement des groupes Echoes from Jupiter, Admirals et NAVIR.

Par Amélie Hubert-Rouleau
Collaboratrice spontanée

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