Les stades de mon breakdown amoureux
T’es assez mature pour voir que tu fais pitié sur le sol. Mais t’as juste pu jamais envie d’te lever. Pourtant, tu le sais que tu vas devoir le faire quand ta mère va se réveiller demain. Ben, plutôt aujourd’hui. Genre, dans quoi, 3 heures? Whatever. Elle va te demander si y reste de la monnaie de l’argent qu’elle t’avait donné pour le taxi. Pis tu vas lui dire que y’en reste pu. Parce que t’as dépensé 8 piasses pour le cover de l’autre sans cœur. «J’te paye ton entrée, pis toi tu m’fous dehors de ta vie», tu t’étais dit. Ben oui, mais c’est parce qu’y compte toujours sur toi, tu l’sais ben.
Mais toi, tu comptes pas sur lui pour t’ramasser dans salle de bain. Tu joues pas dans une série de télé, voyons. Y’arrivera pas en plein milieu d’la nuit dans ta cour en pitchant des roches à ta fenêtre. Ou en klaxonnant dans sa vieille Tercel ’97. Celle avec des wipers neufs parce qu’une fois, y’a une douzaine d’œufs qui a atterri dans le pare-brise. Y’arrivera pas non plus en cognant à ta porte pour tout t’expliquer. Ou même juste pour te rembourser ton 8 piasses. Faut se le dire, tu reverras pu jamais la couleur de cet argent-là.
C’est là qu’ta mère va commencer à t’poser beaucoup trop de questions. Exactement celles que t’auras pas envie de répondre. Toi, t’aimes mieux pogner le rhume su’l plancher en céramique. Mais c’est là que ta meilleure amie va te sauver de la maladie mentale. Elle va te lâcher un call pour te remettre les pendules à l’heure. Sauf qu’avoir pris ton cell dans tes mains, ça va te faire réaliser que ça peut faire ben des affaires ce p’tit bidule-là. Comme envoyer des messages à l’autre sans cœur. Des messages pathétiques que tu vas probablement regretter le lendemain.
Maintenant, t’es rendue au stade d’écouter des tounes pour pouvoir clairement t’achever toi-même. Oh! Mais là, t’étais aussi en train d’oublier tes messages envoyés. T’attends encore sa réponse. Tu vois pourtant que c’est écrit « Seen 4:02 AM ». Le plancher frette t’a p’t-être gelé les idées, qui sait. Y te répondra pas, allume.
Après tes stades stupides des textos et d’la musique, t’es rendue aux photos. Dans ce cas-ci, t’as deux choix. Soit tu regardes les photos de vous deux que t’as dans ton cell en braillant comme ça s’peut pas ou soit tu fais un photoshoot de toi-même avec ton téléphone. La deuxième option va clairement t’être utile pour poster un selfie sur Instagram. Ben oui, c’est vraiment utile, comme ça l’autre sans cœur pensera pas qu’en réalité, pendant tout ce temps, t’étais couchée su’l plancher d’ta salle de bain.
L’autre sans cœur ne saura pas qu’en fait, le silence te tue (en fait, il te fait sentir comme si tous tes organes internes voulaient maintenant avoir le statut d’organes externes, ce qui revient à dire plus rapidement : le silence te tue). Pis de toute façon, si tu te lèves pas bientôt du plancher, tu vas carrément mourir d’hypothermie.
T’aurais dû lui répondre : « Boy, tu t’accordes beaucoup trop d’importance pour c’que t’es réellement.»
Mais qui dit ça dans la vraie vie.
En tout cas, pas toi.
