Je ne serai jamais une maman
Je ne serai jamais une maman. Ou du moins, ce ne sera jamais mon choix, mon rêve. Je ne veux pas d’enfant, ni maintenant, ni plus tard. Quand on prononce ces mots-là, les gens s’en attristent. Ils octroient des regards tristes comme s’il s’agissait d’une monnaie d’échange pour la joie d’être parent que je ne connaîtrai jamais. Sur mon corps qui ne portera pas la vie, ceux qui se désolent de mon choix projettent leurs propres envies d’être parents.
Pis je comprends.
Je comprends, parce que choisir de ne pas vouloir être mère, ça va à l’encontre de ce que notre société tente de nous véhiculer. Après tout, devenir maman ou papa c’est «le plus beau cadeau du monde». C’est le but ultime qui vient avec une maison pis une cour, une job stable pis un revenu fixe, des couches pis du bonheur. À gauche et à droite, on nous bombarde d’images de familles heureuses et de parents fiers.
Pis je comprends.
Je comprends qu’avoir un enfant doit être une chose merveilleuse quand on le désire réellement. Des petits bouts de choux aux visages étincelants, des rires naïfs le dimanche matin avant le premier café. Je les vois, les maudites photos qui envahissent mon Facebook. Pis je les like souvent. Je ne déteste pas les enfants, même que je suis une excellente gardienne. Je les aime les petits monstres, et pourtant, je n’en désire pas.
Mes amies commencent à appréhender ce moment où elles deviendront mères, certaines le sont déjà. On s’en parle comme on parle de nos projets de carrière, parce que devenir parent, c’est un projet. C’est un chemin qu’on choisit d’emprunter pis qu’on suit aussi longtemps que la vie nous le permet. Et quand mes amies terminent leurs éloges de la maternité, de la paternité, des petites choses joufflues qu’elles vont finir par mettre au monde, elles me regardent. Des regards sympathiques, surpris, méfiants et tristes à la fois.
Je ne veux pas d’enfant. Ni maintenant, ni jamais.
C’est dur à saisir, ce refus du but ultime. Celui de laisser une petite partie de soi-même dans ce vaste monde en héritage absolu. Celui de créer la vie et de la voir grandir. Et pourtant, c’est si simple. C’est si simple de ne pas projeter ses propres envies sur ces personnes, hommes ou femmes, qui, comme moi, n’en veulent pas, de vos rêves de bébés.
C’est si simple.
En commençant par arrêter de nous demander de justifier les «comment» et les «pourquoi». La façon dont j’ai choisi de définir mon bonheur ne vous regarde pas. Ma définition à moi n’inclut pas la transformation de mon utérus en un condominium temporaire pour 9 mois. C’est épuisant d’essuyer vos regards tristes quand on ose se révéler, nous, les non-parents en devenir. Il n’arrivera pas ce fameux jour où mon «horloge biologique va kick in». Ni celui où je «comprendrai toute la joie d’être mère». Ni celui où je me mettrai soudainement à capoter sur les annonces de Pampers.
C’est tout ce que je vous demande.
De cesser de juger ceux qui ne font pas les mêmes choix que vous, ceux qui prennent des chemins différents, dont les rêves ne ressemblent pas aux vôtres. Ça ne me diminue pas en tant qu’humain et certainement pas en tant que femme. Ça ne m’empêchera pas de m’épanouir et de mener une vie réussie. Je n’en suis pas moins accomplie. Je n’ai ni l’envie, ni le besoin, et encore moins l’obligation de vous expliquer mon choix. Et je n’ai pas non plus besoin de subir vos mots doux et vos «tu verras».
Si ça te choque, quand quelqu’un autour de toi t’annonce qu’il veut pas d’enfant, you know what, c’est pas ton problème. Les «comment» pis les «pourquoi» de son choix ne t’appartiennent pas. S’il veut bien te les expliquer, écoute-le, mais ne le devance pas avec tes questions préétablies, tes suppositions, ta projection de tes envies à toi. On n’a pas besoin d’avoir tous la même sexualité, les mêmes goûts, les mêmes buts dans la vie. Avoir un enfant n’y fait pas exception.
C’est un choix.
Ni égoïste, ni idiot, ni un tu-vas-changer-d’idée-tu-verras.
C’est juste un choix.
Et le mien, c’est celui de ne pas être mère. Pis ça, c’est pas à toi de le contester. De l’expliquer. De le raisonner. De le justifier. De le virer de tous bords et de tous les côtés pour essayer de trouver du sens.
Ça en a pour moi. Je suis heureuse avec mes décisions pis c’est ça qui compte.