J’ai oublié de prendre soin de moi

Récemment, je me suis rendue compte que je possédais ben des affaires dans la vie. Je veux dire, ben des affaires que la moyenne des gens ont pas. J’ai un toit sur la tête, un chum qui m’aime, des amis, ma propre entreprise, et je suis libre de faire pas mal tout ce que je veux. J’ai fini l’école avec des bonnes notes, j’ai voyagé. J’ai respecté le modèle de réussite de notre société presque à la lettre. Mais malgré tout ça, je suis pas bien. Je sais que je suis chanceuse d’avoir tout ce que j’ai. Mais je suis pas bien. Qu’est-ce qu’il me manque pour être heureuse? Pourtant, je pensais avoir tout…

Jusqu’au jour où je me suis surprise à me regarder dans le miroir et à me passer le commentaire suivant : « Ark ». Et des commentaires comme ça, je dois m’en dire au moins 10 fois par jour. Mais là, pour la première fois je m’en suis rendue compte on dirait. Ce « ark »-là m’a fait mal. Pour de vrai. C’était la première fois que je prenais vraiment conscience de ce que je me faisais subir, jour après jour, pas de journée de congé, depuis des années.

Comment veux-tu que j’apprécie ce que j’ai quand je ne suis même pas capable de m’apprécier moi-même? J’ai manqué de temps. J’ai manqué de temps pour prendre soin de moi. Ou peut-être que je n’ai juste pas pris le temps. J’ai priorisé l’école, ma vie sociale, ma relation avec mon chum. Toutes des affaires qui, pour moi, valent réellement la peine d’être priorisées. Jusqu’au jour où t’angoisses à l’idée de voir tes amis du secondaire. Parce que tu ne te sens plus à la hauteur. Parce que t’as peur de les décevoir. Qu’ils voient que tu te laisses aller, que t’es plus la personne que t’étais avant. Jusqu’au jour où t’angoisses à l’idée que ton chum te voit nue. Parce que tu ne te sens plus à la hauteur. Parce que t’as peur de le décevoir. Qu’il voit que tu te laisses aller, que t’es plus la personne que t’étais avant.

À ce point dans ma vie, j’avais tellement peur de me faire juger par les autres que j’ai arrêté de faire ce que j’aimais. Complètement. J’ai arrêté de peur de ne pas être assez bonne, d’être moins bien qu’avant. Et tu comprendras que tout ça, c’est un cercle sans fin. Parce que plus t’as peur, plus tu t’éloignes de la personne que tu es, plus tu t’éloignes de ce qui te rends fière, de tout ce que tu aimes. Et quand t’as plus d’amour pour toi, c’est vraiment difficile d’aimer le reste et d’apprécier ce que tu as. Plus rien n’a vraiment de valeur à tes yeux, même pas tout l’or du monde, même pas tout l’amour des autres.

Alors? Comment on s’en sort? Je suis loin d’être sortie du bois, mais la première étape, pour moi, a été de prendre conscience de tout ce mal que je me fais subir. Toutes les insultes que je me dis. Tous les regards de déception que je me lance. Toutes les soirées auxquelles j’ai «callé malade» pour pas être vue «comme ça». La prise de conscience, c’est primordial pour pouvoir avancer, pour pouvoir s’en sortir. Une fois que tu touches le fond, tu peux juste aller vers le haut, remonter à la surface. T’as pas fait attention à toi pendant un bout de temps, c’est fait, tu ne peux rien y faire. Maintenant, retrousse tes manches et remonte la côte, une étape à la fois, un compliment à la fois, une soirée entre amis à la fois.

Le but, c’est pas juste de te regarder dans le miroir pis de te trouver «dont belle». C’est d’être fière de toi pour chaque petite action que tu poses, c’est d’apprécier les gens autour de toi pour ce qu’ils sont, c’est de faire confiance, c’est de briser un coup à la fois la carapace que tu t’aies créée pour te protéger du regard des autres, de leur jugement. Parce que dans le fond, et tu vas t’en rendre compte, la plupart du temps c’est de toi qu’ils viennent les jugements. Le travail part de toi, de ta prise de conscience.